La réforme territoriale engagée depuis 2010 a profondément modifié le paysage intercommunal français. Au cœur de cette transformation, les fusions de communautés de communes cristallisent tensions et débats juridiques. Ces regroupements forcés ou négociés suscitent des contestations multiples émanant des élus locaux, habitants et associations. Entre respect du principe de libre administration des collectivités territoriales et impératifs de rationalisation, ces procédures complexes donnent lieu à un contentieux administratif croissant. Cette analyse juridique approfondie examine les fondements légaux, les motifs de contestation et les stratégies contentieuses déployées face à ces fusions intercommunales qui redessinent nos territoires.
Cadre Juridique des Fusions de Communautés de Communes
Le régime juridique des fusions de communautés de communes s’est considérablement étoffé depuis la loi du 16 décembre 2010 portant réforme des collectivités territoriales. Ce dispositif a été renforcé par la loi NOTRe (Nouvelle Organisation Territoriale de la République) du 7 août 2015 qui a imposé un seuil démographique minimal de 15 000 habitants pour les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Cette exigence a contraint de nombreuses communautés de communes à fusionner pour atteindre cette taille critique, sauf dérogations spécifiques pour les zones de montagne ou à faible densité démographique.
La procédure de fusion est encadrée par l’article L.5211-41-3 du Code général des collectivités territoriales (CGCT). Elle peut être initiée par le préfet ou par délibérations concordantes des organes délibérants des EPCI concernés. Le schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI) constitue le document stratégique définissant les contours des futures intercommunalités. Ce schéma, élaboré par le préfet en concertation avec la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI), fixe les orientations d’évolution de la carte intercommunale.
Pour qu’une fusion soit validée, l’accord des communes membres est requis selon la règle de la majorité qualifiée : deux tiers au moins des conseils municipaux représentant plus de la moitié de la population totale, ou la moitié au moins des conseils municipaux représentant les deux tiers de la population. Cette majorité doit nécessairement comprendre le conseil municipal de la commune dont la population est la plus nombreuse, lorsque celle-ci représente au moins un quart de la population totale concernée.
Toutefois, le pouvoir préfectoral s’est considérablement renforcé avec la loi NOTRe. Le préfet dispose désormais d’un pouvoir dérogatoire lui permettant de passer outre l’opposition des communes dans certaines conditions, notamment pour assurer la cohérence des périmètres et l’exercice des compétences. Ce pouvoir exorbitant du droit commun a fait l’objet de nombreuses critiques et recours contentieux.
Les compétences transférées et harmonisées
La fusion entraîne une harmonisation obligatoire des compétences exercées par les anciennes communautés de communes. L’article L.5211-41-3 III du CGCT prévoit que le nouvel EPCI exerce l’intégralité des compétences obligatoires des communautés fusionnées. Pour les compétences optionnelles et facultatives, un délai d’harmonisation respectif d’un an et de deux ans est accordé. Cette période transitoire, souvent source de tensions, peut donner lieu à des contentieux sur l’exercice effectif des compétences.
- Compétences obligatoires : exercées de plein droit dès la fusion
- Compétences optionnelles : délai d’harmonisation d’un an
- Compétences facultatives : délai d’harmonisation de deux ans
Ce cadre juridique complexe constitue le terreau des contestations multiples qui émergent lors des fusions de communautés de communes, tant sur la forme que sur le fond des procédures engagées.
Typologie des Contestations et Recours Juridiques
Les contestations des fusions de communautés de communes se manifestent sous diverses formes et à différentes étapes du processus. Cette diversité reflète la multiplicité des acteurs concernés et la variété des intérêts en jeu. Les recours juridiques s’articulent principalement autour de trois axes majeurs : les contestations préalables à la fusion, les recours contre l’arrêté préfectoral de fusion, et les contentieux post-fusion.
Les contestations préalables interviennent généralement lors de l’élaboration du schéma départemental de coopération intercommunale. Les communes peuvent formuler des objections devant la commission départementale de coopération intercommunale, qui dispose d’un pouvoir d’amendement du projet préfectoral. Ces contestations prennent la forme de délibérations municipales opposées au projet, souvent accompagnées de propositions alternatives. La jurisprudence administrative reconnaît ces délibérations comme des actes faisant grief, susceptibles de recours pour excès de pouvoir.
Les recours contre l’arrêté préfectoral de fusion constituent le cœur du contentieux en matière de fusion intercommunale. Ces recours sont généralement introduits par des communes dissidentes, des associations de défense des intérêts locaux ou des contribuables. Le Conseil d’État a précisé dans plusieurs arrêts les moyens invocables contre ces arrêtés, notamment l’erreur manifeste d’appréciation, le détournement de pouvoir ou le vice de procédure substantiel.
L’affaire de la communauté de communes du Pays de Lapalisse (CE, 20 octobre 2016, n°387282) illustre parfaitement ce type de contentieux. Le Conseil d’État y a annulé un arrêté préfectoral pour non-respect des règles de majorité qualifiée, rappelant l’importance du respect scrupuleux des procédures de consultation des communes membres.
Motifs de contestation fréquemment invoqués
Les motifs de contestation les plus fréquemment invoqués par les requérants révèlent les points de friction majeurs dans ces procédures de fusion :
- L’absence de cohérence spatiale du périmètre retenu
- Le non-respect des bassins de vie et des habitudes de coopération existantes
- L’insuffisante prise en compte de l’identité territoriale et des spécificités locales
- Le défaut de consultation effective des populations concernées
- L’impact financier et fiscal défavorable pour certaines communes
Les contentieux post-fusion concernent quant à eux la mise en œuvre effective de la fusion. Ils portent notamment sur la répartition des sièges au sein du nouvel organe délibérant, l’harmonisation des compétences ou encore les questions patrimoniales et financières. Ces contentieux peuvent être initiés par des élus communautaires, des communes membres ou des usagers des services publics intercommunaux.
Dans l’affaire Commune de Salbris (CC, décision n°2014-405 QPC du 20 juin 2014), le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions du CGCT relatives à la répartition des sièges au sein des conseils communautaires, estimant qu’elles méconnaissaient le principe d’égalité devant le suffrage. Cette décision majeure a contraint de nombreuses communautés issues de fusion à revoir leur gouvernance.
Les Moyens d’Illégalité Externe : Vice de Forme et de Procédure
Les contestations fondées sur l’illégalité externe des fusions intercommunales constituent un axe majeur du contentieux administratif en la matière. Ces moyens, relatifs à la forme et à la procédure, permettent souvent d’obtenir l’annulation d’une fusion sans avoir à démontrer son inadéquation sur le fond. Ils représentent donc des arguments privilégiés pour les communes opposées à un projet de fusion.
Le défaut de consultation des communes membres figure parmi les vices de procédure les plus fréquemment invoqués. La jurisprudence administrative considère cette consultation comme une formalité substantielle dont l’omission entache d’illégalité l’arrêté préfectoral de fusion. Dans un arrêt du 13 décembre 2017 (n°392521), le Conseil d’État a ainsi annulé un arrêté préfectoral pour défaut de consultation régulière d’une commune incluse dans le projet de périmètre. Cette jurisprudence souligne l’importance du respect scrupuleux des procédures consultatives, même lorsque le préfet dispose du pouvoir de passer outre l’opposition des communes.
L’insuffisance de motivation de l’arrêté préfectoral constitue un autre motif d’annulation fréquemment invoqué. Les préfets sont tenus de motiver spécifiquement leur décision lorsqu’ils passent outre l’avis défavorable des communes. Cette obligation a été renforcée par la loi du 7 août 2015 qui exige que le préfet expose les raisons pour lesquelles il s’écarte des avis exprimés par les communes. L’absence de motivation ou une motivation stéréotypée peut conduire à l’annulation de l’arrêté de fusion.
Le non-respect des délais légaux constitue également un vice de procédure substantiel. Les communes disposent d’un délai de 75 jours pour se prononcer sur le projet de périmètre proposé par le préfet. À défaut de délibération dans ce délai, leur avis est réputé favorable. Toutefois, le non-respect de ce délai par l’administration préfectorale peut entraîner l’illégalité de la procédure. Dans l’affaire Commune de Maisons-lès-Chaource (CAA Nancy, 9 février 2017, n°16NC00737), la cour administrative d’appel a annulé un arrêté de fusion au motif que le préfet n’avait pas respecté le délai minimal imparti aux communes pour délibérer.
Irrégularités dans la composition de la CDCI
Les irrégularités dans la composition ou le fonctionnement de la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI) peuvent également entacher d’illégalité la procédure de fusion. La CDCI joue un rôle déterminant dans l’élaboration du schéma départemental et dispose d’un pouvoir d’amendement des propositions préfectorales. Toute irrégularité dans sa composition ou son fonctionnement peut donc affecter la légalité du processus.
Dans un arrêt du 16 novembre 2016 (CAA de Bordeaux, n°15BX03008), la cour administrative d’appel a annulé un arrêté préfectoral au motif que la CDCI n’avait pas été régulièrement composée, certains membres n’ayant pas été valablement désignés. Cette jurisprudence illustre l’attention portée par le juge administratif au respect des règles formelles encadrant le fonctionnement des instances consultatives.
Ces moyens d’illégalité externe offrent aux communes opposées à une fusion des arguments juridiques solides pour contester la procédure. Toutefois, le juge administratif applique parfois la théorie du vice non substantiel pour écarter certains griefs procéduraux lorsqu’ils n’ont pas eu d’influence déterminante sur le sens de la décision ou n’ont pas privé les intéressés d’une garantie. Cette approche pragmatique vise à éviter l’annulation systématique de fusions pour des irrégularités mineures.
Les Moyens d’Illégalité Interne : Contestations sur le Fond
Au-delà des aspects procéduraux, les contestations de fusions intercommunales s’appuient fréquemment sur des moyens d’illégalité interne, qui interrogent le bien-fondé même de la décision de fusion. Ces moyens touchent à la substance du projet intercommunal et permettent d’en contester la pertinence territoriale, économique ou sociale.
L’erreur manifeste d’appréciation constitue le moyen privilégié pour contester le périmètre retenu par le préfet. Ce contrôle restreint du juge administratif permet de censurer les choix manifestement inappropriés sans substituer l’appréciation du juge à celle de l’administration. Dans l’affaire Commune de Saint-Germain-sur-Morin (CE, 31 juillet 2019, n°426313), le Conseil d’État a validé l’annulation d’un arrêté préfectoral de fusion au motif que le périmètre retenu méconnaissait manifestement les objectifs de rationalisation fixés par la loi, en créant une intercommunalité dépourvue de cohérence territoriale et économique.
La méconnaissance du principe de libre administration des collectivités territoriales, consacré par l’article 72 de la Constitution, est fréquemment invoquée pour contester les fusions imposées par le préfet. Toutefois, le juge administratif adopte une approche nuancée, reconnaissant que ce principe doit se concilier avec d’autres exigences constitutionnelles comme la rationalisation de l’organisation territoriale. Dans sa décision Commune de Thonon-les-Bains (CE, 2 juillet 2018, n°416312), le Conseil d’État a rappelé que le pouvoir reconnu au préfet d’imposer une fusion malgré l’opposition des communes ne méconnaît pas, en lui-même, le principe de libre administration, dès lors qu’il s’inscrit dans un objectif de rationalisation de la carte intercommunale.
La rupture d’égalité entre communes constitue un autre argument fréquemment mobilisé. Les communes requérantes font valoir que la fusion crée des déséquilibres injustifiés en termes de représentation, de fiscalité ou d’accès aux services publics. Le juge administratif examine alors si ces différences de traitement sont justifiées par des différences de situation objectives ou par un motif d’intérêt général en rapport avec l’objet de la mesure.
L’impact fiscal et financier des fusions
Les conséquences fiscales et financières des fusions intercommunales font l’objet d’une attention particulière du juge administratif. La jurisprudence reconnaît que des disparités fiscales excessives entre les territoires fusionnés peuvent caractériser une erreur manifeste d’appréciation, particulièrement lorsque les mécanismes d’harmonisation progressive ne permettent pas de les atténuer raisonnablement.
- Disparités dans les taux d’imposition des ménages et des entreprises
- Différences substantielles de dette par habitant entre les EPCI fusionnés
- Écarts significatifs en termes d’intégration fiscale et de mutualisation
- Transferts de charges non compensés entre communes membres
Dans l’affaire Commune de Parmain (CAA Versailles, 8 mars 2018, n°17VE01826), la cour administrative d’appel a validé l’annulation d’un arrêté de fusion au motif que les disparités fiscales entre les territoires fusionnés étaient telles qu’elles rendaient l’harmonisation excessivement difficile, caractérisant ainsi une erreur manifeste d’appréciation du préfet.
Ces moyens d’illégalité interne permettent un contrôle plus approfondi de la pertinence des fusions intercommunales. Toutefois, le juge administratif se montre généralement prudent dans son appréciation, reconnaissant la large marge d’appréciation dont dispose le préfet pour mettre en œuvre la rationalisation de la carte intercommunale voulue par le législateur.
Stratégies Contentieuses et Jurisprudence Émergente
Face à la multiplication des fusions intercommunales contestées, une véritable ingénierie contentieuse s’est développée. Les communes opposées à ces regroupements ont affiné leurs stratégies juridiques, tandis que la jurisprudence administrative a progressivement clarifié les conditions de légalité des fusions.
Le référé-suspension constitue un outil privilégié pour les communes contestataires. Cette procédure d’urgence permet de suspendre l’exécution d’un arrêté préfectoral de fusion dans l’attente du jugement au fond, à condition de démontrer l’existence d’un doute sérieux quant à sa légalité et d’une situation d’urgence. Dans l’affaire Commune de Beaulieu-sur-Dordogne (CE, ord., 16 décembre 2016, n°404815), le juge des référés du Conseil d’État a suspendu un arrêté de fusion, reconnaissant que sa mise en œuvre immédiate aurait des conséquences difficilement réversibles pour la commune requérante.
Cette stratégie présente l’avantage de bloquer temporairement le processus de fusion, maintenant le statu quo intercommunal pendant l’instruction du recours au fond. Toutefois, sa réussite dépend de la capacité à démontrer l’urgence, ce qui n’est pas toujours évident dans le contexte intercommunal. La jurisprudence tend à reconnaître cette urgence lorsque la fusion entraînerait des bouleversements institutionnels ou financiers immédiats et significatifs pour les communes requérantes.
Une autre stratégie consiste à combiner les recours individuels et collectifs. Les communes peuvent agir individuellement contre l’arrêté de fusion, mais également se regrouper au sein d’associations ad hoc pour mutualiser les moyens contentieux. Cette approche permet de diversifier les arguments juridiques et d’accroître la visibilité médiatique du contentieux. Dans l’affaire Association de défense des intérêts de la commune de Follainville-Dennemont (CAA Versailles, 19 avril 2018, n°17VE00965), une association créée spécifiquement pour contester une fusion a obtenu l’annulation de l’arrêté préfectoral, le juge reconnaissant son intérêt à agir.
L’évolution de la jurisprudence sur les fusions forcées
La jurisprudence administrative relative aux fusions forcées, imposées par le préfet malgré l’opposition des communes, a connu une évolution significative ces dernières années. Initialement restrictif, le contrôle du juge s’est progressivement intensifié, sans pour autant remettre en cause le principe même des fusions autoritaires.
Dans l’affaire Commune de Cigogné (CE, 18 décembre 2017, n°401546), le Conseil d’État a précisé les contours du contrôle juridictionnel sur les fusions imposées par le préfet. Il a jugé que le préfet doit démontrer que le périmètre retenu répond effectivement aux objectifs fixés par la loi, notamment en termes de cohérence spatiale et de solidarité financière et sociale. Cette décision marque un approfondissement du contrôle juridictionnel, sans pour autant basculer vers un contrôle normal qui substituerait l’appréciation du juge à celle de l’administration.
Plus récemment, dans l’affaire Communauté de communes du Pays de Lapalisse (CE, 4 novembre 2020, n°436748), le Conseil d’État a confirmé que le préfet ne peut passer outre l’opposition des communes que si le projet de fusion satisfait aux objectifs fixés par l’article L.5210-1-1 du CGCT et qu’aucune alternative satisfaisante n’existe. Cette jurisprudence tend à encadrer plus strictement le pouvoir discrétionnaire du préfet, sans toutefois le remettre fondamentalement en cause.
Ces évolutions jurisprudentielles témoignent d’un équilibre délicat entre le respect de la volonté des communes et l’impératif de rationalisation de la carte intercommunale. Elles offrent aux communes opposées à une fusion des arguments juridiques plus solides, tout en préservant la marge d’appréciation nécessaire à l’action administrative dans ce domaine complexe.
Vers une Gouvernance Territoriale Renouvelée
Au-delà des aspects purement contentieux, les contestations multiples des fusions de communautés de communes révèlent une crise profonde de la gouvernance territoriale française. Elles interrogent notre modèle d’organisation locale et appellent à repenser les relations entre l’État et les collectivités territoriales.
La tension fondamentale entre rationalisation imposée et autonomie locale traverse l’ensemble du contentieux des fusions intercommunales. D’un côté, l’État poursuit un objectif légitime de simplification du millefeuille territorial et de renforcement de l’efficacité de l’action publique locale. De l’autre, les communes et leurs habitants revendiquent le droit de déterminer librement leurs modalités de coopération, conformément au principe constitutionnel de libre administration.
Cette tension se reflète dans la jurisprudence administrative qui tente de concilier ces impératifs contradictoires. Dans sa décision Commune de Savigny-sur-Orge (CE, 5 juillet 2019, n°417226), le Conseil d’État a rappelé que le principe de libre administration ne fait pas obstacle à ce que le législateur définisse des conditions d’exercice de cette liberté, notamment pour poursuivre un objectif d’intérêt général comme la rationalisation de l’organisation territoriale.
La multiplication des contentieux traduit également un déficit démocratique dans la construction intercommunale. Les fusions sont souvent perçues comme des décisions technocratiques, éloignées des préoccupations des habitants et insuffisamment débattues. Ce sentiment d’éloignement alimente la défiance envers les structures intercommunales élargies et renforce les réflexes de repli communal.
Vers des mécanismes alternatifs de résolution des conflits
Face à cette judiciarisation croissante, des mécanismes alternatifs de résolution des conflits émergent progressivement. La médiation administrative, institutionnalisée par la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, offre une voie prometteuse pour désamorcer les tensions liées aux fusions intercommunales.
Plusieurs tribunaux administratifs ont expérimenté avec succès la médiation dans des litiges relatifs à l’intercommunalité. Cette approche permet d’associer l’ensemble des parties prenantes à la recherche d’une solution consensuelle, dépassant la logique binaire du contentieux. Dans certains départements, des médiateurs territoriaux ont été désignés spécifiquement pour accompagner les processus de fusion et faciliter le dialogue entre communes et préfecture.
Au-delà de ces mécanismes institutionnels, une évolution législative semble nécessaire pour pacifier les relations intercommunales. Plusieurs pistes sont évoquées par les acteurs locaux et les juristes spécialisés :
- Renforcement des études d’impact préalables aux fusions
- Introduction d’un droit d’expérimentation permettant de tester temporairement un périmètre intercommunal
- Création d’une procédure de scission simplifiée pour corriger les fusions inappropriées
- Développement de la différenciation territoriale au sein des intercommunalités
La loi engagement et proximité du 27 décembre 2019 a amorcé un mouvement de rééquilibrage en assouplissant certaines règles relatives à l’exercice des compétences intercommunales et en renforçant la place des maires au sein des EPCI. Toutefois, cette évolution reste timide au regard des enjeux soulevés par les contestations multiples des fusions.
L’avenir de l’intercommunalité française dépendra largement de notre capacité collective à inventer un modèle plus consensuel, respectueux des identités locales tout en permettant les mutualisations nécessaires. Les contentieux actuels, loin d’être de simples obstacles juridiques, constituent des révélateurs précieux des tensions qui traversent notre organisation territoriale et des aspirations profondes des élus locaux et des citoyens.
